Première raison de cette tendance pour la future mère : le refus d'un accouchement surmédicalisé. Il n'est plus l'apanage des «baba cool». Quelque 3 à 5 % des femmes choisiraient cette option. L'accouchement à domicile (AAD) n'est plus un phénomène anecdotique en France. On observe une augmentation très nette ces cinq dernières années (1 % des naissances, soit 8 200 bébés par an, contre 0,5 %) mais c'est surtout la demande qui est de plus en plus forte...

Alors que certains professionnels l'estiment entre 3 et 5 % des grossesses, d'autres, comme le collectif Évolutionnaire AAD, affirment que 25 % des Françaises sont désireuses d'accoucher chez elles. Une donnée qui vient nuancer la dernière enquête de la Drees, réalisée par l'institut Ipsos, où plus de 95 % des femmes se déclarent «très ou plutôt satisfaites» des conditions de la naissance de leur enfant. Dans le monde, ce sont 90 % des bébés qui naissent à domicile.

En France, si un décalage existe entre cette demande en hausse et sa faible pratique, c'est principalement à cause de la pénurie des sages-femmes libérales qui ne sont qu'«une soixantaine à oser le faire», explique Jacqueline Lavillonnière, ex-présidente de l'Association nationale des sages-femmes libérales (ANSFL). Mal vues par le Collège national des gynécologues et obstétriciens français qui condamne «ce retour en arrière», ces professionnelles sont d'autant plus rares à faire ce choix qu'elles ne bénéficient pas d'assurance pour leur exercice à domicile. «Ni hors la loi, ni dans la légalité, notre statut est vraiment bâtard», déplore Geneviève Govillé, sage-femme à domicile dans la région parisienne. Or, selon Jacqueline, sage-femme en Ardèche, «à raison de 50 AAD en moyenne par sage-femme et par an, on n'arrive pas à fournir». Certaines, comme à Nantes, iraient jusqu'à 120 par an.

Un phénomène qui ne concernerait plus seulement les régions aux courants de pensée «soixante-huitarde». «À Paris, il y a un accouchement à domicile pour dix demandes», certifie Chantal Birman, sage-femme à la maternité des Lilas. «Aujourd'hui, toutes les catégories socioprofessionnelles y sont sensibilisées», atteste-t-elle. Et ce, malgré les dérapages, comme en Ariège, le 31 août dernier, où un nourrisson est mort après avoir été mis au monde à domicile par une personne se faisant passer pour une sage-femme. «Sur la centaine d'accouchements recensés à domicile dans le département, elle avait suivi 15 femmes, commente Antoine Leroy, procureur de Foix. Le couple de victimes n'était, quant à lui, pas du tout marginal.» Première raison de cette tendance : le refus d'un accouchement surmédicalisé. «Beaucoup de femmes reconsidèrent la naissance comme un événement intime et familial de la vie», explique Chantal Ducroux-Schouwey, présidente du Ciane, un collectif pour la personnalisation de l'accouchement. «Ce n'est pas un acte pathologique mais naturel», défend Caroline, 34 ans qui a accouché chez elle, à Perpignan, il y a deux ans.

«Par conviction ou par défaut»

Pour cet ingénieur-conseil dans l'environnement, la France, au contraire d'États comme les Pays-Bas où 30 % des accouchements se font à domicile, «envisage a priori cette aventure comme une maladie potentielle nécessitant peut-être des soins et non l'inverse». La jeune maman avoue par ailleurs qu'elle n'aurait pas accouché chez elle si le projet gouvernemental des maisons de naissance, ces établissements gérés de façon autonome par des sages-femmes et en attente de décret, avait vu le jour. «Il y a des AAD par conviction, mais aussi et peut-être surtout par défaut, regrette Frédérique Teurnier, présidente du Collège national des sages-femmes. Entre la pénurie de sages-femmes libérales, les maternités de province qui ferment (584 début 2008 contre 1 379 en 1975, NDLR) et les grosses structures qui, à raison de 4 000 accouchements par an, déshumanisent les relations, les parents n'ont plus vraiment le choix», dit-elle en soulignant ne pas vouloir encourager l'AAD. À tel point que dans l'est de la France, un nombre «non négligeable» de femmes passeraient la frontière allemande pour accoucher dans des appartements loués avec l'aide de sages-femmes locales, confirme-t-elle.

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